Dennis McKenna – Une Expérience Extraordinaire Avec L’Ayahuasca

« Quelques années auparavant, alors que je travaillais sur le terrain en Amazonie péruvienne en tant qu’étudiant, j’avais à plusieurs reprises goûté sous le regard vigilant des mestizo ayahuasqueros, la boisson psychédélique Ayahuasca. Pour une raison qui m’échappe, cependant, ces premières expériences n’ont pas été très satisfaisantes. Une combinaison de circonstances, dont la composition variable et souvent faible des breuvages locaux, une tendance de la part du chamane qui préside la séance à sous-doser les participants « gringo », et ma propre hyper-vigilance, une position défensive qui reflétait ma situation précaire dans une contrée étrangère et distinctement étrange. Ces circonstances avaient toutes contribué à m’empêcher de me connecter à l’Ayahuasca, à part peut-être d’une manière légère et superficielle.

Ce n’est que des années après, lorsque j’ai assisté à une conférence organisée par l’União Do Vegetal (UDV), le groupe religieux syncrétique brésilien qui utilise l’Ayahuasca rituellement dans ses cérémonies sous le nom de « hoasca », « vegetal » ou « cha » (thé), que j’ai vraiment ressenti la profondeur réelle de la vision avec l’Ayahuasca. En 1991, le groupe d’études médicales de l’UDV a organisé une conférence scientifique sur l’hoasca, qui s’est tenue dans une maison d’été à quelques kilomètres de São Paulo, adjacente au temple, de la même forme qu’une église et qui sert de centre communautaire et cérémoniel pour un « noyau » local de l’UDV. Quelques années auparavant, j’avais publié plusieurs études portant sur l’Ayahuasca que j’avais menée au Pérou dans le cadre de mes recherches doctorales. Ce travail avait été porté à l’attention de l’UDV et c’est sur cette base qu’ils m’ont aimablement invité à assister à la conférence de São Paulo et à donner une conférence sur les résultats de mes recherches. La conférence a été suivie par environ 500 personnes, la plupart d’entre elles étaient des membres brésiliens de la société religieuse, mais étaient présents aussi quelques étrangers locaux et internationaux, notamment des médecins, des psychiatres, des anthropologues, des botanistes, des pharmacologues et d’autres spécialistes de ce domaine. Il y avait une vingtaine de Nord-Américains invités et j’en faisais partie.

La conférence a commencé un mardi et s’est terminée un samedi. Après quatre jours de conférences, de diapositives et de conversations très animées, nous étions tous bien préparés et impatients de faire l’expérience de la boisson hoasca. Une séance de groupe avait été organisée pour nous au temple le dernier soir de la conférence. Cela correspondait également à l’horaire habituel de l’UDV, qui tient habituellement des séances tous les deux samedis.

La nuit en question, le temps était doux et humide. Au crépuscule, nous avons parcouru la courte distance qui nous séparait du temple depuis les dortoirs où nous étions restés, nichés dans une petite vallée à environ trois cents mètres. Les membres réguliers de la congrégation, dont beaucoup avaient assisté à la conférence mais dont la plupart avaient quitté la ville pour le rituel du soir, avaient déjà pris place dans le temple et étaient assis dans de confortables chaises inclinées disposées sur des terrasses qui encerclaient complètement l’intérieur du temple. Au centre de l’espace en forme d’amphithéâtre, une longue table était dressée, avec des chaises disposées autour et une image de Maître Gabriel, le fondateur et prophète de la religion, accrochée sous une structure en arc ornée du soleil, de la lune et des étoiles. Plusieurs litres de thé hoasca, un liquide brunâtre de la couleur d’un café au lait, se trouvaient dans un distributeur de boisson en plastique placé sur la table sous l’image de Maître Gabriel; à côté se trouvait une pile de gobelets en papier.

Un ensemble spécial de chaises le long d’une des terrasses près du centre de l’amphithéâtre  avait été réservé pour la délégation de « dignitaires » étrangers en visite. Nous nous sommes faufilés parmi les membres déjà assis et avons pris place à l’endroit réservé. Le maître officiant et ses acolytes, surtout des hommes mais aussi plusieurs femmes, étaient déjà assis autour de la table. Après que tout le monde se soit installé, le maître en charge s’est levé pour commencer à distribuer le breuvage, aidé par deux de ses disciples. Les membres formaient une ligne ordonnée (ils semblaient tous savoir où et quand aller et il n’y avait aucune confusion ou besoin de directives) et un par un, nous nous sommes mis debout devant le maître et avons reçu un gobelet contenant notre dose allouée. La taille des portions varie d’une personne à l’autre et semble mesurée selon le poids de la personne et l’œil du maître. Les critères de la dose allouée ne sont pas explicités, mais j’avais comme le sentiment que le maître prenait la mesure de l’âme de la personne qui se trouvait devant lui.

Chaque personne a pris le gobelet qui lui avait été assignée et est retournée se tenir debout devant sa chaise. Une fois tout le monde servi, le maître donna un signal et tous levèrent les tasses jusqu’à leurs lèvres et avalèrent en deux ou trois gorgées la boisson amère au goût désagréable. Un des scientifiques brésiliens debout à côté de moi m’a glissé un petit morceau de gingembre séché à mâcher pour tuer l’arrière-goût. J’étais reconnaissant pour ce geste sympathique.

Après avoir vidé les gobelets, tout le monde s’est assis dans les confortables chaises en palmes tressées. J’espérais toujours que quelqu’un éteigne les lumières fluorescentes, bourdonnantes et éblouissantes au-dessus de nos têtes, qui étaient trop lumineuses et tout à fait ennuyeuses. Elles allaient cependant rester en place toute la soirée. Pendant environ 45 minutes, tout le monde est resté assis, plongé dans ses propres pensées. Le silence absolu régnait; dans une salle de plus de 500 personnes, on aurait pu entendre une mouche voler. Après cette période, quelques personnes ont commencé à se lever et à tituber vers les toilettes, alors que les nausées, un effet secondaire fréquent des premiers stades de l’expérience, commençaient à s’installer. On entendait les bruits de gens qui vomissaient et qui déféquaient dans les salles de bains communes à l’arrière du bâtiment. À peu près au même moment, le maître a commencé à chanter une belle chanson, appelée shamada, et bien que je ne comprenais pas les mots portugais, la mélodie était très émouvante. Le son de la shamada se mêlait aux bruits misérables et haletants des personnes qui vomissaient violemment à l’arrière-plan. Je souriais de l’incongruité de la situation, mais personne d’autre ne semblait le remarquer.

Ma propre expérience ne se développait pas comme je l’espérais. J’avais mal à l’estomac, mais pas assez pour aller aux toilettes et je me sentais agité et mal à l’aise. J’ai senti très peu d’effet, sauf quelques brefs éclairs d’hypnagogie derrière mes yeux fermés. J’étais déçu. J’espérais plus qu’une expérience sous dosée, et je ne voulais pas décevoir mes hôtes soucieux que leurs visiteurs aient une bonne expérience. Quand le maître a signalé qu’il était prêt à donner un deuxième verre à quiconque le voulait, je faisais partie du groupe d’une douzaine de « gringos » qui faisaient la queue devant la table. Apparemment, je n’étais pas le seul à avoir de la difficulté à entrer en communication avec l’esprit du thé.

J’ai pris ma deuxième dose et je suis retourné de nouveau sur ma chaise. Le goût était, si une telle chose est possible, encore pire que la première dose. En quelques minutes, il est devenu évident que cette fois-ci, ça allait marcher. J’ai commencé à sentir la force de l’hoasca à travers mon corps, une sensation d’énergie passant de la base de ma colonne vertébrale jusqu’au sommet de mon crâne. C’était comme être transporté vers le ciel dans un ascenseur à grande vitesse. Je connaissais bien cet état d’activation plutôt agréable depuis mes expériences précédentes avec les champignons, et j’ai accueilli cette sensation comme la confirmation que le train quittait la gare.

La sensation d’énergie et la sensation d’accélération rapide ont continué. C’était un peu comme les champignons, en beaucoup plus fort. J’avais l’impression qu’il s’agissait d’un ascenseur d’où il serait difficile de sortir avant d’avoir atteint le dernier étage. Des bribes aléatoires de sujets dont nous avions discuté lors des séminaires des jours précédents ont commencé à flotter dans ma conscience. Je me suis souvenu d’un séminaire qui avait abordé le concept avancé par l’UDV selon lequel le pouvoir du thé hoasca est une combinaison de « force » et de « lumière »; la « force » était fournie par la liane Banisteriopsis, connue comme « mariri » dans la langue locale, et la lumière – la composante visionnaire et hypnagogique – provenait de la chacruna, la plante contenant la DMT. Je me suis dit que c’était une caractérisation appropriée; l’hoasca était définitivement une combinaison de « force » et de « lumière » et à ce moment j’étais bien sous l’emprise de la « force » et j’espérais être sur le point d’éclater dans « la lumière ».

Au moment où j’ai eu cette pensée, j’ai entendu une voix, semblant venir de derrière mon épaule gauche. Elle disait quelque chose comme, « tu veux voir la force ? Je vais te montrer la force ! » La question était clairement rhétorique et j’ai compris que j’allais vivre quelque chose, que je le voulais ou non. L’instant d’après, je me suis retrouvé transformé en un point de vue désincarné, suspendu dans l’espace, à des milliers de kilomètres au-dessus du bassin amazonien. Je pouvais voir la courbure de la terre, les étoiles au loin, et, bien en dessous, je pouvais voir des spirales et des tourbillons de nuages au-dessus du bassin,  et encore au-dessous, les vastes réseaux nerveux de rivières. Du centre du bassin s’éleva l’Arbre-Monde, sous la forme d’une énorme liane de Banisteriopsis. Elle était torsadée en forme d’hélice et ses sommets fleuris étaient juste en dessous de mon point de vue désincarné. Sa base était ancrée à la terre bien en dessous, perdue dans les profondeurs de la brume et des nuages qui s’étendait sous moi. Tandis que je regardais, stupéfait, la voix expliquait que l’Amazonie était l’Omphalos de la planète, et que l’Arbre-Monde Yggdrasil/Mariri, ondulé comme une corde, était le pivot qui réunissait les trois royaumes – le monde des morts, de la Terre et du ciel – ensembles.

Je comprenais – bien qu’aucun mot n’ait été utilisé – que la liane Banisteriopsis incarnait l’intelligence végétale qui enveloppait la Terre, que la communauté des espèces végétales présentes sur Terre procurait l’énergie qui nourrissait la vie sur Terre et la rendait possible. J’ai « compris » que la photosynthèse – cette astuce ingénieuse, connue uniquement des plantes vertes, pour fabriquer des composés organiques complexes à partir de la lumière du soleil, du dioxyde de carbone et de l’eau, était la « force » dont parlait l’UDV, et était en fait la force dont dépendait toute la vie. Je me suis rappelé la ligne d’une œuvre de E.E. Cummings, qui disait que la photosynthèse était « le fusible vert qui propulsait la fleur ».

L’instant d’après, je me suis retrouvé instantanément transporté dans l’espace vers les profondeurs ensevelies et sans lumières sous la surface de la Terre. J’étais en quelque sorte devenu une molécule d’eau consciente, percolant au hasard dans le sol, perdue au milieu de l’enchevêtrement des énormes fibres des racines de l’Arbre-Monde Banisteriopsis. Je sentais la fraîcheur et l’humidité du sol qui m’entourait. Je me sentais en suspension dans une énorme citerne souterraine. Une goutte parmi des milliards d’autres gouttes. Cette sensation n’a duré qu’un instant, puis j’ai ressenti un sentiment certain de mouvement, car, comprimé par la force implacable des pressions osmotiques, je me suis rapidement retrouvé dans les racines du Banisteriopsis. Le sentiment de montée et de rapidité est revenu, sauf que cette fois j’étais propulsé dans les vastes tuyaux du système vasculaire de la plante. Je n’étais qu’une seule molécule d’eau qui tombait à travers la myriade de branches et de bifurcations de ce labyrinthe vertical, qui devenait de plus en plus étroit à mesure que j’avançais.

Enfin, la sensation d’accélérer verticalement s’est atténué. Je flottais maintenant librement, dans une direction horizontale. Je ne me sentais plus poussé, j’étais suspendu au milieu d’un ruisseau qui coulait à travers un énorme tunnel voûté. Il y avait surtout, cette lumière verte, au fond du tunnel. Au début, je me suis rendu compte que je venais de passer par le pétiole d’une feuille gorgée de soleil et que j’étais en train d’être dévié vers des artères qui se rétrécissaient progressivement au fur et à mesure que j’étais transporté dans les veines articulaires de la plante vers une direction inconnue. Le fait que la voix – ou mon propre moi narratif, je ne sais pas – commentait occasionnellement les étapes du voyage au fur et à mesure qu’il se déroulait, m’a beaucoup aidé.

J’essayais désespérément de me souvenir de mes anciennes leçons de physiologie et d’anatomie des plantes. À ce moment-là, il m’a été donné la compréhension, sans paroles, que j’étais sur le point d’assister, voire de participer, au mystère central de la vie sur Terre, le processus de la photosynthèse, depuis la perspective d’une molécule d’eau. Soudain, je n’étais plus suspendu dans le courant artériel de la veine des feuilles; j’avais été transporté d’une manière ou d’une autre dans un énorme espace clos, baigné d’une lumière verdâtre. Au-dessus de moi, je pouvais voir le toit voûté et bombé de la structure dans laquelle j’étais, et j’ai compris que j’étais à l’intérieur d’un chloroplaste. Le toit était translucide et les rayons du soleil le traversaient comme la fenêtre d’une chambre par un matin ensoleillé.

Devant moi se trouvaient des structures planes ressemblant à des feuilles pliées empilées les unes sur les autres, recouvertes de structures en forme d’antenne, toutes orientées dans la même direction et toutes déployées pour recevoir la lumière. Je me suis rendu compte qu’il devait s’agir des membranes thylakoïdes, les organites à l’intérieur du chloroplaste où se produit ce que l’on appelle la « phase claire ». Les structures en forme d’antenne qui les recouvraient brillaient et bourdonnaient littéralement d’énergie, et je pouvais voir que d’une certaine façon, cette énergie était transférée par les membranes des thylakoïdes. J’ai reconnu, ou « compris », que ces réseaux en forme d’antennes étaient des molécules de chlorophylle, et que les « ancres » qui les liaient à leurs substrats membranaires étaient de longues queues d’acide phytique qui servaient de transducteurs d’énergie, faisant passer l’énergie lumineuse collectée par les récepteurs à travers la membrane et dans les couches qui la recouvraient.

Ensuite, je me suis retrouvé sous cette membrane. J’étais comme transporté sur un tapis roulant. Je pouvais voir les chaînes d’acide phytique pendre au-dessus de moi à travers le « toit » semi-transparent de la membrane. Les groupes de porphyrines en forme de fleurs qui formaient l’appareil de collecte de la lumière des chlorophylles se dressaient comme l’assiette d’une antenne télescope. Au centre de l’espace se trouvait ce qui ressemblait à une surface plane tachetée, périodiquement frappée par d’énormes boulons d’énergie qui émanaient des queues d’acide phytique suspendues au-dessus d’elle, et sur cet autel, les molécules d’eau étaient écrasées en morceaux par ces boulons. Ma conscience explosa et mourut dans un spasme extatique d’électrons alors que j’étais frappé par le boulon d’énergie émis par les transducteurs d’acide phytique. Ma pauvre âme de molécule d’eau se fendit et se brisa en deux. Comme l’énergie lumineuse était utilisée pour ioniser l’eau, l’oxygène libéré au cours du processus s’élevait dans un hurlement pour s’échapper de la chambre des horreurs, tandis que les électrons, libérés de leur matrice, étaient déviés dans les montagnes russes transportant les électrons, glissant sur la chaîne des cytochromes comme une danseuse passant d’un partenaire à un autre, dans les bras du Photosystème, pour être à nouveau explosé par une autre charge photonique, propulsé dans l’étreinte toute proche mais fugace de la ferredoxine, la réceptrice primaire de l’électron, finalement capturée par le NADP+, pour être utilisée comme leurre pour capturer deux protons élusifs, comme une flamme attire un papillon.

Soudain, je me trouvais à l’extérieur des structures thylakoïdes aplaties qui, de mon point de vue, ressemblaient à des immeubles d’habitation circulaires et de grande hauteur. J’ai reconnu que j’étais suspendu dans le stroma, la région à l’extérieur des membranes thylakoïdes, où se déroule la mystérieuse Phase Sombre, le mariage alchimique qui unit le dioxyde de carbone au ribulose-biphosphate, un mariage rapide présidé par la ribusco (ribulose bisphosphate carboxylase oxygénase), première enzyme dans ce qui est appelé la voie des pentoses phosphate. Tout était calme et pendant un moment, je flottais librement dans l’obscurité. Puis, miraculeusement, (les miracles étaient alors bien banals), je réalisais que mon point de vue désincarné avait été réincarné et était maintenant intégré dans la matrice du nouveau complexe ribulose biphosphate/gaz carbonique. Cet intermédiaire instable se décomposait rapidement dans deux molécules de phosphoglycerate qui étaient saisies et chargées dans le manège par les premières enzymes du cycle de Calvin.

J’ai reconnu que j’étais entré dans les premières phases de la dérivation des pentoses phosphate, la voie biochimique qui transforme les produits initiaux de la photosynthèse en sucres complexes et les envoie dans les multiples voies de biosynthèse qui produisent finalement la substance moléculaire de la vie. Je me sentais à la fois humble, ébranlé, épuisé et exalté. Soudain, j’ai été arraché de mon tour de montagnes russes moléculaires et mon œil désincarné était à nouveau suspendu au-dessus du bassin amazonien. Cette fois, il n’y avait pas d’arbre du monde surgissant de son centre. La journée était ensoleillée, la vue qui s’étendait jusqu’à l’horizon courbé était entièrement bleue et verte. La végétation en dessous, bordée de rivières brillantes, ressemblait à de la pourriture verte couvrant une boîte de Petri.

Soudain, j’ai ressenti une tristesse écrasante, une tristesse mélangée à la peur vis à vis de l’équilibre fragile de la vie sur cette planète, des processus fragiles qui conduisent et soutiennent la vie, du destin de notre planète et de sa précieuse cargaison. « Que se passera-t-il si nous détruisons l’Amazonie, me dis-je, que deviendrons-nous, que deviendrons-nous, que deviendra la vie elle-même, si nous laissons cette destruction continuer ? Nous ne pouvons pas laisser cela se produire. Il faut l’arrêter, à tout prix. » Je pleurais. Je me sentais malheureux, j’éprouvais de la colère et de la rage envers ma propre espèce ravageuse et destructrice, à peine consciente de sa propre puissance. Une espèce qui se fiche de la destruction qu’elle laisse sur son passage, qui décime sans réfléchir les écosystèmes et brûle des milliers d’hectares de forêt vierge. J’étais plein de haine et de honte.

Soudain, de nouveau, derrière mon épaule gauche, vint une voix silencieuse. « Vous les singes, vous pensez que vous dirigez les choses », disait-elle. « Vous ne pensez pas que nous laisserions cela se produire, n’est-ce pas ? » Et d’une certaine façon, je savais que le « nous » dans cette déclaration était l’ensemble de la communauté des espèces qui composent la biosphère de la planète. Je savais que j’avais reçu un don inestimable, un morceau de gnose et de sagesse directement venu du cœur/esprit de l’intelligence planétaire, transmis en visions et en pensées par une « ambassadrice » infiniment sage, incroyablement ancienne et d’une grande compassion envers la communauté humaine. Un sentiment de soulagement, tempéré d’espoir, s’est emparé de moi.

La vision s’est estompée, et j’ai ouvert les yeux, pour voir mes nouveaux amis et hôtes se rassembler autour de moi. La cérémonie s’était officiellement terminée quelques minutes auparavant, j’avais été complètement inconscient de ce qui se passait dans le monde au-delà de mes paupières fermées. « Comment était-ce », demandèrent-ils, « avez-vous senti le buhachara (force étrange) ? »

Je me suis souri à moi-même, me sentant ravi à l’idée de partager l’expérience et sachant que j’avais en effet été autorisé à expérimenter la « force » ultime, la machine moléculaire extrêmement étrange, incroyablement complexe du « fusible vert qui propulse la fleur ».

 

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Source : DMT-Nexus